Imaginez une voiture roulant dans la nuit et les phares qui éclairent la pluie. Imaginez l’homme au volant écoutant la suite N°3 pour violoncelle de Bach. La musique remplie vos oreilles, il ne se passe quasiment rien et pourtant c’est bien là que se trame le drame. Cet homme est seul, où va-t-il, d’où vient-il, nous ne le saurons jamais. Son histoire lui même n’en sait rien. Il a trop imaginé de choses. Ses souvenirs se brouillent. Les hommes ont trop imaginé de choses. Il ne sait plus où réside la Vérité. Il recherche une terre où s’arrêter, Son océan à lui recherche ce rivage où accoste la terre, un visage de femme, le visage d’une enfant, de sa fille, de son fils. Mais il ne sait toujours pas le pourquoi de sa visite ici bas, quelle équation des profondeurs des mers doit exister ici et faire naître sur terre l’inédit…
Imaginez un homme écoutant Bach et écrivant ces mots dans la solitude d’un soir de Novembre… Redéfile devant lui le drame d’une semaine qui s’effacera comme tant d’autre, Il n’a jamais attaché de l’importance à ce temps qui s’écoule, il ne voit ici bas ni bien ni mal, il semble encore baigné des profondeurs de l’indicible, de l’indéfini, de l’infini et les choses et le temps qui s’accroche à ses basques ne pèsent pas bien lourd.
Il pense à ses enfants, le souvenir de sa jeunesse lui semble bien loin. Et ses enfants en devenir le préoccupe. La direction de sa vie le préoccupe. Il est comme chacun sous influence mais il est aussi comme le rocher qu’use la marée mais qui semble demeurer impassible.
Pendant que se trame le drame, pendant que se joue la musique, pendant que les hommes tissent et tirent les ficelles, il demeure imperturbable et hors du temps. Tel est son drame. Ses actions sont à long terme et le monde est en mouvement quand il paraît immobile.